3 min read

Trop, c’est trop!

Bien avant l’ouverture de la saison 2024-2025, les principaux acteurs du football international (Ancelotti, Uli Hoeneß, Guardiola, Jürgen Klopp…) ont dénoncé l’inflation des compétitions, aux dépends de la santé des joueurs et de la qualité du spectacle. Les instances du foot ont fait la sourde oreille, répondant par une forte augmentation du nombre de matches en Champions League et le lancement d’une coupe du monde des clubs supplémentaire! Dont acte.

Constat sans appel

Nombre de pays réclament aujourd’hui leur grand prix de formule 1. Tant de métropoles revendiquent leur tournoi international de tennis et/ou de golf! Combien de régions veulent leur course cycliste de renom… Le football n’échappe pas à cette multiplication des compétitions qui impose aux sportifs des calendriers surchargés. Que dire des forçats de la route qui enchaînent classiques, grands tours, championnats, critériums et autres kermesses? Et quid des champions de tennis qui, aux quatre coins du monde, accumulent les exigeants tournois avec leurs inévitables décalages horaires et variations saisonnières? Faute de plages de repos nécessaires à leurs organismes pour une récupération physiologique, ces sportifs sont tentés de recourir à toutes sortes de dopages qui faussent les épreuves et compromettent leur santé future. C’en est trop.

Lésions dangereuses

Sollicités en permanence, les meilleurs footballeurs des clubs phares sont impliqués dans d’interminables compétitions nationales et internationales; où les équipes les plus modestes compensent leur infériorité technique par un jeu défensif volontariste et un engagement physique accentué. Aux dépens de l’intégrité physique des acteurs et de la beauté des rencontres. 

Malgré l’accroissement des effectifs dans les formations de l’élite, les trous d’air et les blessures sont désormais le lot des footballeurs. Se succèdent, en particulier, les graves ruptures des ligaments croisés qui, la saison dernière, auront privé le Réal Madrid de ses deux défenseurs centraux titulaires, Militao et Alaba. Trop, c’est trop!

Mondial de cynisme

En alimentant généreusement les caisses des instances du football et discrètement les portefeuilles de certains de leurs hauts dignitaires, le Qatar a obtenu l’organisation de "Sa" coupe du monde. Au prix (si l’on peut dire) d’une longue coupure dans le calendrier des fédérations nationales. Les championnats ont été interrompus pour la préparation de la compétition reine du foot; disputée sous les éprouvantes températures du Moyen-Orient; suivie de la reprise des compétitions nationales en hiver. Autant de contraintes fortement préjudiciables à la récupération des joueurs.

La coupe du monde du cynisme s’est déroulée au mépris de nombreux produits importés au Qatar: ces travailleurs immigrés pour tirer leurs familles de la misère. Combien auront succombé à la chaleur torride baignant les chantiers de construction de stades équipés d’air conditionné, ce must pour le « succès » de la grande « fête » du football! Un mondial sous le signe du dédain des règles écologiques à respecter pour la survie de la planète. Le tout rendu possible en achetant au prix (très) fort le soutien de stars du ballon rond comme Zidane et Beckham.

L’impudence saoudienne

L'Arabie Saoudite recrute de plus en plus de vedettes de la planète foot en leur offrant des conditions financières mirobolantes, difficiles à refuser. La Saudi Pro League a enclenché un processus délétère: le Moyen-Orient est en train de vider l'Occident de ses meilleurs footballeurs. Où va le foot? Les voix élevées contre la densité des épreuves sportives ne sont pas entendues dans la cacophonie du brouillard médiatique ambiant.

La tentative de création d'une Super League qui aurait réduit le nombre de matchs, en préservant la qualité des rencontres et la santé des acteurs, avait reçu l'adhésion initiale des principales institutions du ballon rond européen. Elle a avorté. Face à la levée de boucliers des équipes de second rang; motivées par les encouragements démagogiques de l’UEFA soucieuse d’accentuer sa mainmise sur le football continental et son opulence, non sans la fortune de certains de ses dignitaires.

Voilà une haute instance qui a octroyé une légitimité à Nasser El Khelaifi, bombardé membre du Comité exécutif de l’UEFA, après avoir été Président de l’ECA, l'Association européenne des clubs. Et ce, en faisant fi de son cumul de fonctions, en flagrant conflit d’intérêts: Nasser El Khelaifi, l’homme aux multiples casquettes, n’est-il pas, entre autres, PDG du PSG, de QSI (Quatar Sports Investments), DG de BMG (BeIn Media Group), membre de la LFP (Ligue de Football Professionnel) française, ministre d’état du Qatar? 

Lorsque BeIn négocie les droits télévisés avec la Ligue, Nasser traite avec Nasser! Dans le football hyper médiatisé, sont prégnants le poids des sponsors, la manne des droits télévisés, la stratégie géopolitique de quelques autocraties et la corruption de certains dirigeants. Mais quelles que soient nos convictions personnelles, il n’est pas inutile de nous demander quel football nous méritons. Alors, amis: sport business, ou sport éducatif? Foot du fric, ou foot en fête?