Nach Munchen ( ll )
Ce tour éliminatoire a été à la hauteur des attentes : en nous offrant un beau spectacle, les rencontres souvent indécises ont mis à l'honneur l'engagement et le jeu collectif, en particulier offensif ; et ont ouvert les portes des demi-finales à des équipes méritantes. Le football est bien sorti vainqueur de ces quarts de finale.
Formidables
À confirmation de ses performances dans les compétitions nationales, le FC Barcelone a déployé au stade olympique de Montjuic un jeu séduisant, bien huilé : chaque joueur sachant ce qu'il doit faire, toujours au service de l'équipe. Générosité et enthousiasme sont de règle chez ces jeunes joueurs qui parlent le même langage. À l'unisson, ils ont récité de mémoire leur football appris et partagé à l'académie de La Masia. Le Barça s'est appuyé sur un milieu de terrain dominateur, où la bonne agressivité s'accompagne d'un bagage technique, d'une intelligence tactique et d'un jeu en mouvement exemplaires. Le pressing collectif facilitait la récupération du ballon et le culé porteur du cuir recevait en permanence le soutien de plusieurs de ses partenaires. Une organisation favorisant l'expression des talents individuels. Pedri s'y est affirmé comme l'avisé playmaker révélé avant ses deux années de galère causée par des blessures répétées. De Jung a enfin mis en évidence les qualités techniques et le sens du jeu affichés à l'Ajax d'Amsterdam voilà 4 ans. La troïka offensive du Barça a fait bon usage des occasions procurées par son entrejeu. Une fois encore, Yamine Lamal nous a adressé un message : il plane sur le continent et seule une blessure paraît en mesure d'interrompre son vol. Rafinha a montré une vivacité et une justesse dans ses prises d'initiative rarement observées en terre bretonne. Quant à l'inoxydable Lewandowski, il nous a rappelé qu'à 37 ans, il reste un redoutable buteur et un attaquant complet. Les Blaugranas ont annoncé à l'Europe qu'ils avaient les moyens d'aller au bout de la compétition. Avec une réserve, toutefois : le Borussia Dortmund n'étant pas un obstacle infranchissable, il convenait d'attendre une opposition plus forte…
Jusqu'au soir du match retour où, à la surprise générale, les Catalans timorés ont été bousculés par des Prussiens conquérants ; pourtant privés de plusieurs titulaires importants et à la traîne en Bundesliga suite à un début de saison catastrophique. On a retrouvé la fringante finaliste de l'édition précédente de la Champions League, qui avait mis en difficulté le Real Madrid. Dans un Westfalenstadion surchauffé, avec un hat trick de Guirassy, les Jaunes ont étouffé les Blaugranas dont le milieu et les attaquants se sont avérés insignifiants. Mais sans réussite, leur victoire 3-1 n'a pas suffi pour assurer aux Allemands une qualification méritée, que les dieux du foot leur ont refusée.
Les mêmes dieux, sans doute, n'ont pas aidé le Bayern, une équipe bien construite, homogène, et qui joue bien. Avec un poil de réussite, les Bavarois auraient passé le tour. Le manque de réalisme de leur division offensive, surtout lors du premier match à Munich, a été mis en échec par le pragmatisme des Lombards. Malgré les bonnes dispositions de Harry Kane, un des tout meilleurs attaquants de ces dernières années, qui reste à la recherche de la conquête d'un grand titre international. Vincent Kompany et ses hommes seront spectateurs de la finale tant attendue dans leur antre de l'Allianz Arena. Ils n'auront pas à rougir de leur comportement dans cette Champions League. Car leur vainqueur, l'Inter de Milan, n'a pas volé sa qualification. C'est une formation complète, bien disposée sur le rectangle vert ; compacte, forte de Pavard et Sommer, ex du Bayern, qui a donné aux Allemands une leçon de discipline ! Cet Inter de Milan est doté d'un entrejeu dynamique et de deux attaquants complémentaires ; dont le joueur vedette, l'Argentin Lautaro Martinez, n'a rien perdu de son savoir-faire d'animateur du jeu offensif interista et a retrouvé sa réussite de puntero. Pavard s'est rappelé au bon souvenir de ses anciens partenaires et de Didier Deschamps en signant un but décisif, point d'orgue à une prestation remarquée.
Arsenal a été une équipe très supérieure au Real Madrid dans les deux confrontations : un vrai team au collectif énergique qui attaque et défend en bloc. La défense est solide, avec un William Saliba intraitable. Martin Odegaard est un meneur de jeu inspirateur, qui laisse bien des regrets aux madridistas. De retour de blessure, Bukayo Saka revient à son excellent niveau de jeu ; celui d'un gaucher à la couverture de balle précieuse, au toucher soyeux, d'une rare vitesse de course et d'exécution, d'une combattivité contagieuse ; et d'une modestie qui rend naturelle son implication dans le travail défensif nécessaire à l'équilibre de l'équipe.
Au Parc des Princes, le PSG a confirmé sa mue. La formation marquée par le culte des vedettes hyper médiatisées chère (!) à ses propriétaires qataris, s'est comportée en un bloc de jeunes joueurs vaillants, solidaires et ambitieux. De quoi relancer les certitudes d'une presse au service de l'empire médiatique de ses riches bailleurs de fonds medio-orientaux : le PSG new look de Luis Enrique est un proche vainqueur de la Ligue des Champions. Pour Tiro Libre, cette profession de foi est recevable, si les dirigeants parisiens ne retombent pas dans leurs recrutements spectaculaires de stars glamours peu portées sur l'effort. Car le club de la capitale a aligné un milieu de terrain conquérant, de techniciens qui demeurent d'humbles travailleurs du ballon rond. Devant, Doué a impressionné par sa classe et son culot. Barcola a fait parler sa vitesse. Quant à Dembélé, ses qualités hors normes de couverture de balle, de vitesse, d'indépendance des pieds, de frappe de balle ne sont plus à vanter. Désormais, il y ajoute une activité, avec une mobilité et un surprenant leadership qui font porter en lui tous les espoirs. Quand il aura gommé ses moments d'absence, de baisse de concentration face au but, il sera un sérieux candidat au Ballon d'Or. Mais chassez le naturel…
Lors du match retour au Villa Park, les Parisiens ont été repris par leurs vieux démons : après un début idéal de maîtrise traduit par deux buts, portant à quatre réalisations leur avance sur les joueurs de Birmingham, les champions de France à répétition ont sombré ; nouvel aveu d'impuissance, devant des Villans revigorés, combattifs et appliqués, mais abandonnés par la chance. Car comme contre Liverpool, le PSG doit sa qualification aux parades monumentales de Donnarumma ; aussi brillant sur sa ligne qu'il a pu par le passé être déficient dans le jeu aérien et catastrophique dans ses singulières initiatives au pied.
Fort minables
Un Real au train de Sénateur, indigne du statut d'une Institution ayant triomphé à quinze reprises dans la majeure compétition européenne, a été balayé à l'Emirates Stadium par les Gunners. Avec trois candidats déclarés au Ballon d'Or et une flopée de joueurs de qualité sur le terrain et sur le banc, face à un bon Arsenal qui n'est pas une grande équipe, le spectacle d'un Real sans âme et dépourvu de système de jeu collectif, était pitoyable. Sur les gradins du Bernabéu, l'incompréhension des madridistas, habitués à la révolte de leur Real menacé, a fait place à la grogne ; puis à la tristesse résignée. Le poids des chaussures à crampons était trop lourd pour les footballeurs castillans qui accusent une fatigue physique et une lassitude psychique excessives ; auxquelles ne sont pas étrangères les exigences d'un calendrier surchargé et d'une domination prolongée de la planète foot. Au Bernabeu, les Madrilènes ont été incapables de franchir la défense des Gunners, bien préparés à attendre les Merengue très bas et prompts à déclencher des contre-attaques bien construites.
Faut dire que cette saison, à l'image de Manchester City, l'autre club dominant le foot européen ces dernières années, en Liga ce Real peine à battre des équipes modestes qui « mettent le camion ». Dans ces conditions, comment s'étonner si les Madrilènes n'ont pu faire sauter le verrou de la meilleure défense de la ligue anglaise ? D'autant que le Real ne dispose pas de leader sur le terrain. Mais de là à confier le brassard à un Lucas Vásquez dépourvu de charisme, lui qui comme joueur n'est pas titulaire, non ! Le passeport espagnol et le CV merengue ne justifient pas cette incohérente concession de la direction sportive du club à la démagogie locale.
Hormis l'impeccable Courtois, les défenseurs de la Casa Blanca ont manqué d'agressivité, ce « jus » sans lequel les duels sont voués à l'échec. Ils ont défendu en reculant, comme pour éviter d'affronter l'adversaire. À leur décharge, faute d'un pressing collectif systématique rejeté par les attaquants et tenté sans conviction par des milieux réticents, l'arrière-garde merengue s'est retrouvée isolée ; face aux assauts de rivaux galvanisés par l'opportunité de mettre à genoux leur prestigieux rival… dans son stade mythique ! Et ni Lucas Vásquez, ni Carletto, manageur bon papa, n'ont pu obtenir des héros de tant de campagnes victorieuses, de courir et lutter ensemble pour participer résolument à la récupération du ballon. Les demis madrilènes ont accepté de subir la domination de leurs rivaux.
Vers un nouveau Real
Vrai, opposé à des équipes bien regroupées en défense, le Real Madrid manque cruellement d'arrières latéraux qui accompagnent leurs partenaires de l'attaque dans de précieux débordements et des centres aériens liftés dans la boîte, ou à terre en retrait. L'absence d'un meneur du jeu du secteur offensif n'arrangeant rien, les milieux sans ressorts du Real ont été mangés par leurs homologues d'Arsenal comme ils le furent contre le Barça au Bernabeu. Le Real Madrid a besoin d'un leader sur le terrain et d'un playmaker, deux fonctions que peut assumer Rodri ; de deux arrières latéraux forts défensivement et susceptibles d'assister efficacement leurs attaquants ; d'un défenseur central grand par la taille et le talent, intraitable dans le un contre un ; d'un jeune entraîneur compétent, dynamique, porté sur le football offensif, comme Xavi Alonso. Constructeur fameux, Florentino Pérez sait que le chantier est lourd. Et doit être entrepris dès à présent, afin de replacer la Maison Blanche sur le toit de l'Europe en pratiquant un beau football d'attaque, spectaculaire ; conforme à la vocation de l'Institution, définie par son inspirateur Don Santiago Bernabéu. Avec ses trois ex futurs Ballons d'Or et des jeunes d'avenir, fournir des prestations aussi pauvres est inacceptable : l'intérêt financier du Club qui, aux dépens de ses intérêts sportifs, a déterminé l'ère des galactiques, n'est plus justifié aujourd'hui. Du naufrage actuel, se sauvent Courtois, digne de son statut ; Bellingham qui ne renonce pas à lutter ; Valverde pour sa bonne volonté, qui peut en faire un arrière droit ; et Mbappé par intermittences. Ces dernières années, sans fond de jeu véritable, le Real a réalisé des miracles grâce à ses stars. Dans un marché déstabilisé par une concurrence féroce, en particulier de richissimes autocraties en quête de sport washing, il devient urgent de donner au plus grand club du monde un jeu collectif qui magnifie ses joueurs têtes de gondole. Et de mettre fin aux récriminations auprès des arbitres et autres comportements indignes de la tradition de la Maison Blanche. Malgré toute l'estime que Florentino porte en Carletto, l'entraîneur le plus titré du Real et le gentleman longtemps apprécié pour son management humain, le Président Pérez doit aujourd'hui préparer l'après Ancelotti en rendant effectif le retour à la Maison Blanche de Xavi Alonso.